1 septembre 2017

L'aciérie du Manoir à Pîtres

Aciérie de Pompey

L'aciérie du Manoir à Pîtres
(Introduction)


Le fer en Normandie

La Normandie a été, dès l'époque gauloise, un haut lieu de métallurgie, du fait de la présence de combustible (la forêt) et de minerai de fer.
Fer en Normandie

Le fer autrefois
Le fer de météorites, tombé du ciel et parfois d'une grand degré de pureté, a été travaillé dès le IIIe millénaire av. J.-C. en Mésopotamie et en Egypte, mais les premiers fers obtenus par réduction de minerai remonteraient au début du IIe millénaire. En Europe, il succède au bronze (alliage de cuivre et d'étain) vers 800 av. J.-C.

La métallurgie du fer nécessite une température (1500 degrés) plus élevée que celle du bronze et donc plus de connaissances techniques, mais produit un métal beaucoup plus résistant, fournissant des armes plus légères et de meilleurs outils.  L'agriculture devient peu à peu grande consommatrice de fer : on estime que la mise en culture, par essartage, d'un hectare de forêt, requérait en moyenne la consommation d'un kilogramme de fer.
 Le fer fut longtemps un matériau précieux, et avant l'introduction des pièces, les Grecs utilisent des tiges de fer comme monnaie.
La production se faisait avec des petits-fourneaux (ou bas-fourneaux), constructions d'environ un mètre de haut, percées de trous pour activer le feu, avec au milieu ou en contrebas, un bassin destiné à recevoir la fonte. On chauffait le fourneau au charbon de bois, puis on jetait peu à peu le minerai lavé et pilé, auquel on ajoutait un peu de chaux ou de marne, en ventilant à l'aide de soufflets ; on continuait à alterner des charges de minerai, de charbon et de marne, jusqu'à produire une masse de fonte d'une quinzaine de kilos, la loupe. Le fondeur, alors, ouvrait la queue de renard, par où s'écoulaient les laitiers amassés à la surface de la fonte, puis on attendait que la loupe refroidisse un peu pour la découper, au moyen du marteau-tranchant, en lingots que l'on passait dans un autre feu, puis martelait sur l'enclume pour en faire socs de charrue, carrés, barres de différentes grosseurs, bandages de roues, etc.
marteau-tranchant
Ces fers pouvaient aussi être convertis en fil pour la fabrication des épingles : on tirait, à la force des bras*, au moyen de longues tenailles non tranchantes, le fer qu'on faisait passer dans des filières de plus en plus étroites.

* La bobine, sorte de cabestan qui tire le fil, bientôt mis en mouvement par la force hydraulique, ne semble avoir été employée qu'au début du 19éme, à Romilly-sur-Andelle.
Au XIXème siècle, l'apparition des grosses-forges et de leur haut-fourneau allait concentrer dans les mains des maîtres de forges, souvent des nobles, le travail de ferrons qui, jusque-là, avaient vécu entourés de leurs familles dans leurs ateliers où ils étaient les maîtres, et furent contraints de prendre le chemin de l'usine. Alors que dans les forges à bras, le même ouvrier dirigeait toutes les opérations, dans les hauts-fourneaux et les grosses-forges, le travail se partageait entre un maître-fondeur, un maître-chauffeur, un maître-affineur et un maître-marteleur, ayant chacun sous leurs ordres manœuvres et petits valets.
Forge - St Denis sur Sarthon
St Denis sur Sarthon

La fonte était coulée dans le sable, sous formes de bandes ou lingots d'environ une tonne, les gueuses, transportées à la forge pour y être affinées ; on ne présentait alors à la fournaise que l'extrémité de la gueuse et la matière en fusion qui s'en échappait était recueillie dans un creuset où elle formait une loupe de 60 à 80 kilos. On fouettait cette loupe avec des marteaux à bras, lui donnant une forme carrée et, quand elle était solidifiée, on la façonnait au moyen de gros marteaux de 4 à 500 kilos mus par l'eau.

Les travailleurs du fer

Les férons ou forgerons pratiquaient la confraternité et l'hospitalité. Dans chaque forge il existait un tronc alimenté par des cotisations ou des amendes ; quand un compagnon se présentait et qu'il s'annonçait comme cousin du foisil on l'invitait à forger une barre qu'on lui faisait porter sur l'enclume ; s'il se sortait bien de l'épreuve, on vidait le tronc en sa faveur, on l'hébergeait et s'il n'était pas embauché, on lui fournissait les moyens de gagner une autre forge.

Chaque année vers la fin du mois de juin les fourneaux et les forges faisaient relâche, on célébrait la Saint Eloi, patron des forgerons, fête que le christianisme avait substitué aux antiques Vulcanales en l'honneur du dieu du feu Vulcain.

Hymne des forgerons

C'est aujourd'hui la Saint-Éloi.
Suivons tous la vieille loi.
La forge, il faut balayer (bis),
Les outils, il faut ramasser.



Allons au bourg promptement,
Monsieur le curé nous attend.
La Messe il faut écouter (bis)
Et celui qui va la chanter.



Nous voilà tous revenus.
Que cinquante coups soient bus.
Et de notre pain bénit (bis)
Nous en porterons au logis.



Nous allons fleurir le marteau
Et lui donner du vin sans eau.
Que nul ne fasse de bruit (bis)
Car nous allons dîner ici.



A la santé du marteleur,
Sans oublier son chauffeur,
Ainsi que le brave affineur (bis)
Qui travaillent tous avec cœur.



Les filles de notre canton
Aiment bien les forgerons,
Elles n'ont pas peur du marteau (bis)
Quand dessus (censuré par A. Desloges)


On trouve la fin du vers dans une version qui contient un couplet de plus, pas forcément de très bon goût, mais montrant que le respect pour la religion pouvait céder la place à la paillardise:

Saint Eloi avait un fils
Qui s’appelait Oculi ;
Et quand le bon saint forgeait
Son fils Oculi soufflait.

S’il y a des filles dans nos cantons
Qui aiment bien les forgerons,
Elles n’ont pas peur du marteau
Quand elles sont dessus le haut. 

Sédillot note que traditionnellement on brocarde la vanité des forgerons, qui se justifiait par les qualités qu'ils devaient déployer et par la considération qu'elles leur valaient à une époque où l'on prisait par-dessus tout la force physique.

Ils jouaient avec le feu, dont ils avaient fait leur serviteur, ils savaient rendre souple le métal et le transformer en objets devenus indispensables et se trouvaient de ce fait supérieurs aux autres artisans. Les légendes faisaient d'ailleurs des premiers forgerons des dieux ou des héros : Titans travaillant dans les forges de l'Etna, dirigés par Vulcain, si puissants que leurs coups de marteau ébranlaient la Sicile...

Les forgerons de campagne étaient assez souvent taillandiers, cloutiers et surtout maréchaux ferrants….. et faisaient parfois office de médecins, de dentistes et de vétérinaires. Le monde moderne en fera aussi des garagistes.

Fin d'une époque

L'établissement des grandes voies de communication - routes royales, puis nationales et départementales- avait favorisé la concurrence et porté une première atteinte à la fabrication du fer en Normandie, puis le chemin de fer aggrava la situation et, enfin, la loi de libre échange de 1860, qui ouvrait le marché français aux fers étrangers, porta le coup fatal.
Au début du XXème siècle, il ne restait que la Société Métallurgique de Normandie, à Caen, et le Forges de la Madeleine à Breteuil.

La guerre qui éclate en 1914 allait ramener en Normandie une nouvelle usine sidérurgique : Pompey.

La dynastie des Fould
Léon Fould fonde une banque en 1795.
Alphonse Fould (1850-1913), polytechnicien, est cofondateur et président de la Société des Hauts Fourneaux, Forges et Aciéries de Pompey.
René Fould, centralien, est président des Chantiers de Saint-Nazaire et PDG de la Société des Hauts Fourneaux, Forges et Aciéries de Pompey de 1902 à 1957

Avant l'arrivée au Manoir

On se souvient du nom par lequel l'usine a été ici longtemps désignée : Pompey, du nom d'un village qui appartient aujourd'hui à la banlieue de Nancy, où Alphonse Fould et Auguste Dupont ont créé la Société des Hauts Fourneaux, Forges et Aciéries de Pompey.
Après l'annexion de la Moselle par les Allemands en 1871, Auguste Dupont ne veut pas que son usine, les Forges d'Ars-sur-Moselle, travaille pour eux. Il construit une nouvelle usine à Pompey, près de Nancy, avec deux premiers hauts-fourneaux au coke.
Tour Eiffel - Forges de Pompey
Pour la construction de la tour Eiffel, un appel d'offres est lancé, remporté par Fould-Dupont, avec lequel les Ateliers Eiffel signent des accords financiers selon lesquels tous les fers employés doivent provenir de Pompey.. La commande, passée en 1887, consiste en 8.546.816 kg de fer puddlé*, pour 15.000 poutres et poutrelles, et 2,5 millions de rivets.

À l’époque, l'usine produit 3 à 400 tonnes de fer par semaine. Alphonse Fould, devenu seul gérant, fait évoluer en 1897 la société Fould-Dupont en société anonyme sous le nom de Société des Hauts Fourneaux, Forges et Aciéries de Pompey. Deux autres hauts-fourneaux seront installés, mais la sidérurgie disparait de Pompey en 1986. 

* Le puddlage est un procédé d'affinage consistant à décarburer la fonte dans un four à l'aide de scories. Largement employé au XIXe siècle, le fer puddlé va s'effacer peu à peu devant l'acier avec l'arrivée des convertisseurs.

Aciérie de Pompey
Mais avant Pompey, il y avait eu les usines d'Ars-sur-Moselle, de Metz, et de la Sarre. Ces installations sont en pleine prospérité quand éclate la guerre de 1870 et qu' Ars-sur-Moselle est annexée à l’Empire allemand, ce qui entraîne le repli sur Nancy (Pompey), qui en 1871 reste française. Une des usines ayant été détruite dès le début de la guerre, la Société décide d'en créer une nouvelle dans une région moins vulnérable, et c'est ainsi qu'elle vient installer l'usine de Pîtres, près du Manoir.

1917: arrivée à Pîtres

Suffisamment éloigné de la frontière, au confluent de l'Andelle et de la Seine, disposant des atouts des axes fluviaux, routiers et du chemin de fer, le site propose aussi un ensemble de terrains non bâtis et de faible valeur agricole. Ces éléments sont aussi ceux qui, trente ans plus tard, amèneront à Alizay l'usine de cellulose.

Il reste beaucoup à faire, par exemple retrouver les traces des premiers cadres et ouvriers arrivés pour construire et démarrer l'usine. Les archives sont rares et les témoignages encore plus, mais nous espérons le pouvoir dans les numéros suivants, nous nous contenterons pour ce numéro de résumer.

Brève histoire de l'usine

1917-1940

A cette époque, la production était presque exclusivement destinée aux grandes compagnies privées de chemins de fer qui à partir de 1925 s'étaient lancées dans une politique d'unification de leur matériel ferroviaire, fixe ou roulant, ce qui valut à l'usine du Manoir une importante activité jusqu'en 1932.

En 1933, la crise économique amène la Société à diversifier sa production et à s'orienter vers les constructeurs d'engins de levage, la construction navale et le pétrole.

Nous n'avons pour l'instant ni archives ni témoignages concernant la guerre 1939-45.

Après-guerre

Les effectifs se renforcent de l'arrivée de personnel de la France de l'Est (les "Ardennais") et autrichiens : Claude Leeb (père de Michel Leeb) spécialiste des aciers inox, premier four à arc, en 50-60.
Aciérie du Manoir Claude Leeb
Un des premiers patrons d'après-guerre fut Henri de Costier, champion de course automobile régulièrement classé au Mans dans les années 1920, époux d'une Miss France. 

En 1945, l'usine, équipée de fours à arc, produisait environ 300 tonnes d'acier par mois. Il est alors décidé d'aller plus avant dans les moulages de qualité, et des travaux de refonte complète, mis en œuvre en 1949, se terminent en 1951, date à laquelle commence la fabrication des moulages en aciers inoxydables et réfractaires.

Dès lors, le Manoir s'implante dans les secteurs de la robinetterie industrielle et de l'armement. En 1968, M. Cazettes de Saint-Léger, alors président de la Société, devenue entre temps les Aciéries du Manoir-Pompey confie la direction à Roger Hubert, ingénieur dans l'usine depuis 12 ans, qui accentue les efforts vers la qualité métallurgique et le développement de technologies sophistiquées qui portent l'usine à un  niveau international. 

L'usine est alors capable de réaliser toutes pièces en acier moulé dans pratiquement toutes techniques de moulage (cire perdue ou céramique) et tous alliages, entre 1 kg et 20 tonnes, y compris en centrifugation, horizontale ou verticale.
La centrifugation, une technique en rapport avec la cimenterie de Pîtres ?
Les études pour réaliser des tubes d'acier par centrifugation commencent dès le début des années 60, et la fabrication industrielle en 1964, avec une licence achetée aux Etats-Unis. C'est une technologie couramment employée pour couler des gros tubes de ciment, mais difficile à maîtriser en fonderie, surtout quand il s’agit d’aciers réfractaires contraints aux hautes températures, mais l'emploi d'une technique dans la même commune a pu influencer ce choix, qui fera de Manoir Industries un leader mondial de ce produit.

Aciérie du Manoir  - Centrifugation : la force centrifuge plaque l'acier en fusion contre les parois du moule, qui tourne, dans lequel il est coulé.
Centrifugation : la force centrifuge plaque l'acier en fusion contre les parois du moule, qui tourne, dans lequel il est coulé.

Elle se spécialise dans les fournitures de tubes, vannes et éléments de pompe pour la pétrochimie, qui s'est considérablement développée à partir des années 1960, et le nucléaire (pièces internes des réacteurs, tuyères, etc.). Toutes ces pièces, pouvant peser jusqu'à 12 tonnes en moulage classique et 22 tonnes pour les tubes, sont en acier inox et en particulier en acier à très bas taux de carbone obtenu par l'utilisation de cornues sous argon dont peu de fonderies européennes sont équipées.
Des moyens de contrôle de plus en plus sophistiqués sont mis en œuvre : magnétoscopie, ultrasons, ressuage, courants de Foucault, gammagraphie et radiographie.


Ce premier article n'était qu'une présentation générale. Nous continuerons, dans le prochain numéro, avec des témoignages vécus, plus précis. Pour y contribuer, vous pouvez contacter l'association, nous vous en serions très reconnaissants.

Sources

Jean Vidalenc. La petite métallurgie rurale en Haute-Normandie
Amand Desloges Forges de Normandie 1903
Pierre Sédillot, dans Légendes et curiosités des métiers,
http://savoir.fer.free.fr, excellent site consacré à la forge et aux hauts-fourneaux
Jean Lambert-Dansette Histoire de l'entreprise et des chefs d'entreprise en France (L'Harmattan, 2009)
témoignages personnels
documents internes fournis par l'entreprise


Pîtres 1919-1940

PÎTRES 1919 - 1940

PÎTRES 1919 - 1940
(suite de la lecture des registres du conseil municipal commencés en 1793)




La guerre 14-18 laisse peu de traces dans les registres : quelques demandes d’assistance de familles de soldats, des collectes pour le front, la demande de récupérer le boulanger et le maréchal-ferrant. Même pas de traces de cérémonies de victoire en novembre, mais en 1919 est lancé le projet d’un monument aux morts, comme cela est en train de se faire dans la France entière (un article lui sera consacré dans le prochain numéro).
PÎTRES 1919 - 1940 Monument aux morts


Municipalité : nombreuses crises

Paul Fréret, patron des clôtures Fréret (voir n°2), est maire depuis 1910. En 1920, a réélection ne semble pas acquise, car c'est Albert Roze, le meunier, qui arrive en tête au premier tour (les conseillers élisent le maire). Mais au deuxième tour se présente Jean Meslin, qui rafle toutes les voix (sauf une…), et refuse le mandat, acceptant d'être l’adjoint de Paul Fréret qui venait derrière lui. Tour de passe-passe ? Trois ans plus tard, en 1923, (sans même que le registre du conseil en fasse mention!), le conseil est dissous par décision du Ministère de l'Intérieur, qui nomme une délégation spéciale, présidée par Paul Fréret ayant Jean Meslin et Auguste Bélissent comme adjoints, donc finalement très peu de changement : pourquoi cette dissolution dans ce cas ? Le mystère risque de rester entier.

Est-ce Albert Roze qui posait problème?
Dissolution conseil municipal de Pîtres 1923
Dissolution conseil municipal de Pîtres 1923
Après quelques recherches sur l'Internet, cet extrait du Journal Officiel...

En tout cas, il ne sera pas réélu conseiller, alors que Paul Fréret redevient maire, et Jean Meslin adjoint. Il reste maire en 1925, mais démissionne en décembre 1926, remplacé par Jean Meslin avec Pierre Delafosse (le nouveau meunier) pour adjoint, lui-même ayant refusé ce poste.

Une nouvelle crise a lieu en 1932, avec la démission de la totalité du Conseil municipal, obligeant à de nouvelles élections, qui reconduisent un conseil dans lequel on ne trouve plus Pierre Delafosse. 

En 1935 Jean Meslin est réélu, avec pour adjoint A.Vallée. Il démissionne en 1939, peu avant les élections municipales, et Paul Fréret redevient maire. Il est "démissionné" en septembre 1941 par le sous-préfet, et personne n'acceptant de le remplacer, le ministre "considérant qu'il n'est pas possible de constituer une municipalité après la démission du maire, considère le conseil municipal comme dissout et prévoit une délégation spéciale*"

* Le régime de Vichy voulait des municipalités qui ne lui soient pas hostiles ; les autres étaient destituées et remplacées par une « délégation spéciale ». 
Pîtres Harlé
Le président en sera Roger Harlé, patron de la cartoucherie, assisté de Paul Fréret, André Meslin, et R. Lefebvre. Le décret émane de Vichy, le 24 septembre, et est signé de Pierre Pucheu, qui dans une adresse aux habitants écrit qu'il faut "considérer avec reconnaissance l'œuvre accomplie par les précédentes municipalités … que les regards de tous soient fixés sur la France et tous les efforts tendus à son service sous la conduite du Maréchal Pétain."

En juillet, on avait souscrit à l' édition sur papier de Chine à 250 francs du portrait de Pétain. Le tirage sur parchemin coûtait 1 500 francs. Les préfets incitaient fortement les maires à souscrire à l'une ou à l'autre édition. Le choix de l'édition bon marché a pu être pris pour une marque de tiédeur...

Le loyer du presbytère

Le loyer du presbytère, fixé à 150 francs en 1907, avait été considéré comme trop peu élevé par le préfet, mais le conseil municipal de l’époque, présidé par Albert Roze, avait maintenu ce chiffre. En mai 1919, on se propose de le porter à 400 francs. L’évêque refuse, et propose 250 francs, que le conseil accepte pour un an. Le sous-préfet, lui, conseille de s’en tenir aux 400 francs demandés, mais le conseil maintient son acceptation des 250 francs : les autorités municipales se montrent à nouveau moins dures que la préfecture.
Pîtres " Le presbytère n’a rien perdu de son charme …"  Plan de construction (Archives municipales de Pîtres)
" Le presbytère n’a rien perdu de son charme …" Plan de construction (Archives municipales de Pîtres)

En février 1920, le bail du presbytère est porté à 600 francs. Dans un premier temps, on pourrait y voir une menée anticléricale, le maire, Paul Fréret*, étant libre-penseur.

* " il ne rentrait jamais dans l'église", nous a rapporté une vieille habitante de Pîtres, elle-même pratiquante, "mais il  aurait mérité de vivre cent ans car il ne faisait que du bien".
Cela a pu jouer, mais il suffit de se reporter à l'inflation d'après-guerre pour s'apercevoir que ces exigences étaient plutôt douces : 150 francs de 1907, déjà considérés comme une faible somme, n'en valaient plus que 50 en 1920 par le simple jeu de l'inflation! Mais on est habitué à une monnaie stable depuis un siècle, et on comprend mal qu'il faille réajuster les prix.

En fin de compte, l'Abbé Périnelle s'en tire très bien, puisqu'il refuse de payer 600 francs, et qu'on établit un nouveau bail à 325 francs, soit moins de 100 francs de 1907 ! Le conseil ne sera pas rancunier, puisqu'il votera en 1939 une participation aux frais d'inhumation de "Périnelle, indigent, curé à Pîtres pendant 33 ans".

Poste , téléphone

En 1920, le conseil municipal proteste : "considérant que la privation de courrier postal le dimanche cause un grand préjudice aux habitants des villages…. que par la suite de cet état de choses une partie de la France se trouve isolée du reste de la Nation pendant 48 heures par semaine..." (on se croirait en présence d’un texte écrit sous la Révolution) "...qu’il est normal que les facteurs ruraux puissent disposer d’un jour par semaine" (le facteur travaillait déjà 6 jours sur 7) "…demande que la distribution du courrier postal soit rétablie le dimanche dans les villages et les hameaux".

Le chemin de fer, la gare

Gare de Pîtres
En 1923 on prévoit de doubler la ligne de chemin de fer Charleval-Pont de l'arche, ce qui sera fait, pour peu de temps car les Allemands pendant l'Occupation récupéreront une voie pour fondre des canons...
Par contre le projet de transformation de la halte en gare est jugé trop cher. Il sera définitivement abandonné en 1931, le conseil dénonçant la "mauvaise organisation de l'administration des travaux publics qui exagère la part demandée aux communes".

Commencent aussi les demandes de barrières au passage à niveau, dont on ne verra le résultat que dans les années 1980. On proteste aussi contre une suppression éventuelle de la ligne, en soulignant les inconvénients de l'autocar (verglas, brouillard, etc.).

En 1939 la municipalité soutient l'offre de M. Riquier qui propose une desserte de Rouen à Amfreville par autocar : le chemin de fer commence à rencontrer la concurrence de la route. 

Electricité

Facture  d'électricité  de la commune de Pîtres en 1939, pour l'éclairage public et la mairie, qui comprend les écoles. Le total ci-dessus ferait environ 840 euros  2015, avec le kWh à presque 1,20 euro, soit dix fois le prix actuel : on ne dépense pas les kWh par milliers. En 1934, on avait  posé quatre lampes pour l'éclairage communal.
Facture d'électricité de la commune en 1939, pour l'éclairage public et la mairie, qui comprend les écoles. Le total ci-dessus ferait environ 840 euros 2015, avec le kWh à presque 1,20 euro, soit dix fois le prix actuel : on ne dépense pas les kWh par milliers. En 1934, on avait posé quatre lampes pour l'éclairage communal. 

L'électrification commence vers 1920. Le syndicat intercommunal des cantons de Fleury et de Pont de l’Arche va opter pour une concession à la Société Andelysienne d’électricité. Les lignes électriques coûtent 53 650 francs (environ 5 millions d'euros 2015), dont un cinquième est payé par la Société Andelysienne et deux cinquièmes par les consommateurs éloignés.

Ecoles

Depuis l'ouverture des aciéries de Pompey, la population a augmenté, et une seconde classe est prévue chez les garçons et les filles, car les effectifs vont de 70 à 80 élèves. L’extension coûtera 33 355 francs (environ 3 millions d'euros 2015, la construction en brique revenant évidemment plus cher...)

Cette ouverture de classe supplémentaire n'est pas encore faite en 1929, puisqu'on la demande encore, et qu'on mandate le maire pour la construction de locaux.

Mais l'année suivante voit la création de deux postes d'instituteurs (l'instituteur est M. Robineau) et la commune emprunte alors pour 30 ans les 160 000 francs qui restent à sa charge (sur 317 745). On annulera par la suite l'emprunt à la caisse des dépôts et consignations en arguant que l'État doit le prendre lui-même en charge.
Ecole de Pîtres
Filles et garçons, une centaine, rassemblés devant leurs écoles, avant la construction des ailes

Ecole de Pîtres

En 1936 l'inspecteur primaire demande l'ouverture d'une troisième classe (il y a en effet 98 élèves) et le conseil donne un avis favorable en disant que l'on pourra utiliser la cantine, mais l'année suivante, cafouillage : le conseil municipal rappelle qu'il "avait demandé inconsidérément" la création d'une troisième classe de garçons, d'abord, puis "revenant sur cette erreur manifeste" une troisième classe de filles et de jeunes enfants, qu'il persiste dans cette dernière demande, et menace de ne plus prendre à l'école les enfants de moins de six ans ni ceux des communes voisines. La situation semble très tendue, si l'on en juge par cette lettre adressée à Jean Meslin par Paul Fréret, suivie de sa lettre à l'Inspecteur.
Pîtres - lettre adressée à Jean Meslin par Paul Fréret
Pîtres - lettre adressée à l'Inspecteur par Paul Fréret

Par ailleurs, le conseil demande à M. Mendès-France des renseignements sur la fourniture de lait dans les écoles, et proteste contre la distribution des prix : "certains de ceux-ci ont été délivrés au nom de formations politiques", et "en vue d'éviter des incidents regrettables pour l'avenir" on supprime l'allocation municipale de 1000 francs, remplacée par une distribution de lait en période hivernale, pour laquelle on vote un budget de 4000 francs.

En octobre, , le conseil "décide de ne plus se réunir avant d'avoir obtenu satisfaction" concernant la troisième classe.

En 1939, il se joint à la pétition de parents dont les petites filles n'ont pu être admises à l'école, et argumente qu'il y a alors 173 élèves, dont 11 étrangers à la commune, répartis en cinq classes, plus 19 qui n'ont pas été acceptés, ce qui porte le total à 192, et qu'on ne peut donc imposer une sixième classe puisqu'on supprime cette sixième classe si l'effectif est inférieur à 200 ...
En novembre, on installe un mur de refend dans l'école pour assurer l'enseignement provisoire (souligné sur le registre) des évacués de la région parisienne, et on attend de l'aide.

Les vacances scolaires

En 1800, les vacances allaient du 5 août au 20 septembre, pour permettre aux enfants d'aider à la moisson et aux vendanges. Napoléon III accorde cinq jours supplémentaires pour les fêtes de Pâques, puis il faut attendre 1939 pour une importante extension : 2 jours à la Toussaint, 2 semaines à Noël, 2 ou 4 jours au mardi-gras, 2 semaines à Pâques, et grandes vacances du 15 juillet au 30 septembre.

En 1926, on ne trouve trace à Pîtres que de six jours de congé accordés aux écoles primaires, en plus de Pâques et des grandes vacances : quatre le 1er janvier et deux à la Pentecôte.

Circulation, automobile, routes

La  vitesse dans l'agglomération est limitée à 40 km/h pour les automobiles, et 25 km/h pour les camions, et 6 km/h au carrefour.
Pîtres - Pas encore de feux ou de stops au carrefour, mais des instructions fermes pour la sécurité !
Pas encore de feux ou de stops au carrefour, mais des instructions fermes pour la sécurité !

En 1936, 196 ouvriers de Pompey signent une pétition demandant la réfection de la route et son goudronnage (sans doute une indication sur le mode de transport pour se rendre au travail : il ne se fait plus à pied comme auparavant).
Pîtres - Adoption de l'instrument de base : le sifflet à roulettes !
Adoption de l'instrument de base : le sifflet à roulettes !

Dérivation de l’Andelle

En 1931 on évoque les plans de dérivation de l’Andelle, d'un pont et d'une passerelle, le remblai du "trou de la commune" (est-ce le même que le "trou du curé" ?), décrit comme formant un fer à cheval derrière l'usine Fréret.
Pont au port de Poses à Pîtres
Elle est approuvée si les habitants du port de Poses (qui, comme chacun sait, est à Pîtres) peuvent se rendre en voiture dans le bourg.
En 1936, on pétitionne pour que l’Andelle soit classée ni navigable ni flottable: c'est la fin d'une époque.

La Seine, l’eau


Le barrage de Martot, détruit en 1938
Le barrage de Martot, détruit en 1938
D' importants travaux ont lieu sur la Seine pour la rendre plus navigable, c'est le sens de la destruction du barrage de Martot : les écluses d'Amfreville deviennent le dernier obstacle avant la mer, et la marée remonte jusqu'à Pîtres. Mais le niveau de la nappe phréatique a suivi la baisse du niveau de la Seine, et les puits vont disparaître, ce qui explique qu'en 1939 on se préoccupe de l'adduction d'eau : 9 points d'eau sont prévus sur la commune, et on crée un Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de la région en aval du barrage de Poses, comprenant les communes allant de Pîtres à Martot. (il existe encore sous le nom de SIAEP Andelle-Seine)

Fêtes

Chaque année on fixe le programme de la fête du 14 juillet, soit en règle générale illuminations, tir, rassemblement, distribution des prix, décollation d’oie et jeu de ciseaux (couper les yeux bandés une ficelle à laquelle est attaché un cadeau), et le bal. 
La décollation de l'oie, pratique barbare ?
 décollation de l'oie

Un défenseur de la tradition défend cette pratique sur son site (arquebusiers.be/decapitation-oie.htm), avec des arguments parfois peu convaincants : cela "n'a rien de barbare puisque l'animal est mort" (essayons donc avec des chats ou des chiens !…) "la tradition remonte au moins au Moyen-Age" (au nom de la tradition, rétablissons alors le pilori, le bûcher, la roue...et en remontons plus loin, les sacrifices humains !)
 décollation de l'oie
 "La méthode varie selon les régions, elle se faisait soit au sabre, les yeux bandés l'oie pendue ou à terre, ou à main nue en courant (plutôt pour les enfants), ou en chariot tiré par des hommes ou par des chevaux ou encore comme toujours actuellement lancé à cheval, et même à vélo…" c'est plus moderne… il est d'ailleurs étonnant qu'on n'ait pas pensé aux motards...
Elle cesse d'être perçue progressivement, mais ne sera abrogée officiellement qu'en 1971.


           
En 1934, la crise pesant de plus en plus lourd, on décide que le bal ne sera pas gratuit, qu'il n'y aura pas de jeux et que les illuminations seront réduites, et en 1939 on soustrait 2000 francs sur le budget des fêtes pour l'assistance aux mobilisés.

Assistance, aide sociale

En 1920, on vote un don de 400 francs qui seront envoyés au mont Saint-Quentin, dans la Somme, pour aider à sa reconstruction (situé près de Péronne, le village avait été entièrement détruit).

Puis la crise de 1929, née aux Etats-Unis, n’atteint guère la France qu’à partir de 1932, et on en trouve de nombreuses traces dans le registre des délibérations :
· réunion pour "examiner la situation créée aux ouvriers et ouvrières des chaussures par suite de la grève des usines de Pont de l'Arche" (trois présents)
· emploi des chômeurs à des travaux communaux : budget de 2000 francs.
· demande la création d'une caisse de chômage à laquelle seraient alloués 3000 francs, dont les allocations cessent du 1er juin au 1er octobre « pour raisons budgétaires " (on estime que la période des travaux agricoles permet de trouver du travail). Cette caisse sera rattachée à la caisse départementale, mais l'année suivante, elle ferme, faute de pouvoir rembourser l'emprunt car les subventions n'arrivent pas. 
La base d’allocation d'aide est de 7 francs par jour pour la personne secourue , plus 4 francs pour une épouse, si elle ne travaille pas, et environ 2 francs par enfant, selon l’âge, mais ceci en général pour seulement 3 jours par semaine, soit en moyenne environ 15% du salaire d'un ouvrier.

Cyclone

Cette même année est votée une aide de 2000 francs pour les victimes du cyclone au port de Poses. Effectivement, du 23 au 24 février 1935, un violent cyclone traverse la France d'ouest en est, seul le Nord étant épargné.

Réfugiés

L'année 1938 voit l'arrivée de réfugiés de la région parisienne, que l'on accueille d'abord dans les écoles, puis que l'on va disperser chez les habitants, en prévoyant qu' "une cuisine sera établie par quartier ".
 En 1938, ceux de la guerre d'Espagne ne sont pas encore arrivés, il doit donc s'agir des juifs autrichiens, de Vienne, qui fuient Hitler après l'Anschluss.

Budget

En 1927, estimant insuffisante la taxe sur les chiens, le conseil la porte à 10 ou 4 francs, selon la catégorie, puis en 1931, à 24 ou 6 francs (soit moins d'une dizaine d'euros 2015 en moyenne) : les frais de perception devaient déjà l'emporter sur le rapport, ce qui entraînera son abandon.

Taxe sur les chiens
Le Second Empire avait établi une taxe municipale, selon deux catégories : chiens d'agrément ou de chasse, et chiens utiles, servant à guider les aveugles, à garder les troupeaux ou les habitations. La raison invoquée était la lutte contre les chiens errants et la rage. Pour les chiens de compagnie, on peut y voir une taxe somptuaire, comme pour les chevaux de selle et les attelages des voitures suspendues, et plus tard les billards ou les vélocipèdes.

Le budget de la commune a augmenté depuis le 19ème siècle, mais reste peu élevé : en 1934, par exemple, il est de 12 000 euros en équivalent 2015.

Ecologie

Beaucoup d'espèces, parfois aujourd'hui protégées, sont encore à l'époque considérées comme de vraies nuisances et traitées comme telles : on organise la destruction des pies, corneilles, geais, émouchets, buses, et en 1936, on fait lecture d'une lettre adressée par M. Mendès-France, député et maire de Louviers, sur la destruction des nuisibles, "considérant les dégâts occasionnés chaque année par ces animaux."
Pêche à Pîtres
            Mais il y a encore de beaux poissons dans l'Andelle…



Michel Bienvenu




Le carillon de la Bastille

carillon de la Bastille - Démolition de la Bastille en 1789
Démolition de la Bastille en 1789

Le carillon de la Bastille


Installé à la Bastille* en 1784 pour fonctionner avec une horloge monumentale visible dans la cour centrale, ce carillon comprenait trois cloches, de 125 kilos, 72 kilos et 50 kilos, fabriquées par la famille Chéron en 1761 et 1762. Ces cloches étaient entraînées par un mécanisme, œuvre d'un dénommé Quillet. Lors de la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, le cadran fut détruit, par contre le mécanisme de l'horloge et les cloches** furent épargnés.

* La Bastille, construite durant la guerre de cent ans pour protéger Paris  des Anglais,  fut très vite impopulaire, car son constructeur avait crû bon de réquisitionner tous les oisifs de Paris pour construire cette prison forteresse, ce qui  provoqua beaucoup de mécontentement et sa disgrâce : de ce fait il en fut le premier locataire…

** Elles étaient décorées de fleurs de lys, et de filet en surépaisseur, ainsi que de figures allégoriques. La troisième cloche porte la mention : CES TROIS CLOCHES SONT FAITES PAR LOUIS CHERON, FONDEUR DE LA COUR POUR LA ROYALE BASTILLE, L'AN 1761. sur les deux autres: JEAN CHERON M'A FAIT 1762. ce qui prouve que presque toujours les fondeurs travaillaient en famille, et très souvent au pied de l'édifice pour lequel les cloches étaient prévues.
Trois jours plus tard, le 17 juillet, le marquis de la Salle, commandant de la milice parisienne, fit démonter le mécanisme ainsi que les cloches par un maître horloger dénommé Regnault et l'ensemble fut remisé au « district Saint-Louis de la culture » (nouveau nom révolutionnaire de la ci-devant église) avec l'étiquette « cloches du 14 juillet, vestige du despotisme ». Le 24 août, le mécanisme et les cloches arrivèrent à la fonderie de cuivre de Romilly pour y être fondues. En effet, à l'époque, du fait de l'embargo anglais, la France manquait de cuivre, métal nécessaire à la fabrication de monnaie, à la construction navale et à la production de canons. C'est pourquoi il fut décidé de rechercher du cuivre de récupération à travers toute la France, les églises ne devant garder qu'une seule cloche et les autres être dirigées vers des fonderies de cuivre, dont celle de Romilly sur Andelle.
À l'arrivée du carillon, le directeur, M. Grimpret, fit le choix de l'utiliser pour régler la vie de l'entreprise, il l’installa dans un petit campanile et c'est ainsi que pendant plus de cent ans, jusqu'à l'arrêt de la fonderie en 1897, ces cloches se firent entendre à Romilly…
carillon de la Bastille - Romilly sur Andelle
A l'occasion de ses visites à la Fonderie, essentielle pour la marine et les canons, Bonaparte, alors premier consul, accompagné de sa femme Joséphine et du ministre de la marine Kellermann, le 14 brumaire an XI (novembre 1802), puis empereur (en 1812) entendit donc sonner le carillon de la Bastille.

Lors de la fermeture en 1897, dans une vente aux enchères, l'ensemble carillon-mécanisme fut acheté dans un ensemble de bric-à-brac par un dénommé Dupré-Neuvy. En 1900, le carillon fut présenté à l’Exposition universelle, et par la suite un héritier, le docteur Neuvy, devenu propriétaire de cet ensemble, adopta un dénommé René Bernard qui héritera de l'horloge. Gravement malade et hospitalisé pour une très longue période, René Bernard, ayant reçu la visite régulière d'un scout, Michel Lévesque, en témoignage de reconnaissance lui fit don du carillon en 1957...
carillon de la Bastille - Sur cette photo, on voit bien à la fois les trois cloches et le mécanisme d'entraînement du carillon : poulies, cordes et poids.
Sur cette photo, on voit bien à la fois les trois cloches et le mécanisme d'entraînement du carillon : poulies, cordes et poids.

carillon de la Bastille - Sur cette photo, on voit bien à la fois les trois cloches et le mécanisme d'entraînement du carillon : poulies, cordes et poids.
Sur cette photo, on voit bien à la fois les trois cloches et le mécanisme d'entraînement du carillon : poulies, cordes et poids.

« Je soussigné René Bernard, fais don à Michel Lévesque, demeurant 13 boulevard Saint-Marcel à Paris XIIIe, de l'horloge et des cloches de la Bastille, que j'ai reçues en héritage de M. Neuvy en août 1955. »
carillon de la Bastille
En 1977, Michel Lévesque vend le carillon à Jean-Louis Viguès, collectionneur de la période révolutionnaire, et propriétaire d’un restaurant Place de la Bastille à Paris qu’il baptisera « Au carillon de la Bastille ».
En 1984, le carillon est classé monument historique.
carillon de la Bastille
À Romilly, Colette Théry, alors chargée des Affaires culturelles au Conseil municipal avait contacté Jean-Louis Viguès pour une exposition du carillon qui malheureusement n'eut pas lieu. Le propriétaire, profitant du retentissement du bicentenaire de la Révolution, le mit en vente à l’hôtel Drouot.
Le 15 décembre 1989, l'État français, alerté par Colette Théry, fit valoir ses droits de préemption et acheta le carillon pour 620 000 francs. Depuis cette date le carillon est devenu la pièce maîtresse du Musée d'art campanaire ouvert à L'Isle-Jourdain, dans le Gers, à 25 km de Toulouse.
Ainsi, après avoir passé 25 ans à la Bastille, 100 ans à Romilly, le carillon attend désormais les visiteurs dans le Gers. En juin 2005, il a même fait un voyage à Pékin dans une exposition sur le thème « Art campanaire et Histoire de France » pour évoquer la Révolution Française.
En 2013, pour commémorer le séjour du carillon à Romilly, la municipalité a installé dans le haut de la rue Saint-Georges un petit édifice abritant une cloche.

Sources :

C.Théry in Confluences (AMSE) 14/6/92
B.Bonnissent in L’impartial 12/8/92
J.Coupon in Paris-Normandie nov 1988
C.Courage in La dépêche 4/11/89
Courrier de l’Eure 7/1/84
L’impartial 5/1/90
Historia Juil 1969
Notice du Musée européen d’Art campanaire.
L’étrange destin des choses (J.M Epinois et R.Morand) 
Après la chasse. Marcel Ouin chez R. Lachêvre. Pontoise

Jean Barette