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1 décembre 2017

Le port de Poses (à Pîtres…)

Le port de Poses à Pîtres

Le port de Poses à Pîtres …


Il y a eu plusieurs ports de Poses, mais l'un se trouve à Pîtres, l'autre à Amfreville…
Le premier devait être du type "posée" : à marée basse*, les bateaux à fond plat s’échouaient sur les rivages en pente douce et les bateaux étaient alors déchargés ou chargés en attendant une remontée du niveau de l’eau. Ce lieu d’échouage ou posée se situait à deux pas du débouché de la rue du port sur la Seine. Cette rue allait de la Seine à la commune de Léry à travers la plaine.
 * la marée remonte dans la Seine jusqu'au barrage, et jusqu'à la porte marinière dans l'Andelle

Le port de Poses à Pîtres. Vue de la plage de Poses en aval du barrage, emplacement supposé de la posée
Vue de la plage de Poses en aval du barrage, emplacement supposé de la posée

Le deuxième était un lieu d'embarquement pour la traversée de la Seine à l’aide d’un bac ou d’une nacelle. Ce procédé existait probablement depuis le Moyen Âge, assurant la traversée de Poses à Pîtres, à l’aval du célèbre pertuis, et dans le prolongement de la rue du Port à Poses.
Le port de Poses à Pîtres. Extrait du plan cadastral de Pitres de 1825
Extrait du plan cadastral de Pitres de 1825
Le port de Poses à Pîtres. Même les chevaux passent le bac ...
Même les chevaux passent le bac ...

Le port de Poses à Pîtres. Bac… et plus tard les automobiles
… et plus tard les automobiles

Le troisième est celui des bateaux à vapeur du XIXe siècle propulsés par des roues à aubes. À partir de 1830 existait une ligne régulière Paris Rouen dans les deux sens avec 18 arrêts dont celui de Poses. En fait le bateau ralentissait, une barque chargée de ses voyageurs venait au contact du vapeur, échangeait les personnes et le vapeur continuait sa route.
Le port de Poses à Pîtres. Extrait du plan cadastral de Poses de la première moitié du XIXe siècle
Extrait du plan cadastral de Poses de la première moitié du XIXe siècle

Le port de Poses à Pîtres. Promotion pour le service régulier de bateau à passagers
Promotion pour le service régulier de bateau à passagers
Le port de Poses à Pîtres. Tarifs pour le service régulier de bateau à passagers
Tarifs pour le service régulier de bateau à passagers 

Sur la reproduction de la lithogravure suivante, figure un panneau au pied duquel se trouvent un couple et une barque. C’est probablement le lieu d'embarquement de ce troisième port au bout de la rue du Port à Poses.


Le port de Poses à Pîtres. Lithographie de l'aval du barrage
Lithographie de l'aval du barrage

Le quatrième, appelé port de Poses, se situe paradoxalement sur la rive opposée, c’est-à-dire à Pîtres, à l’embouchure de l’Andelle. Sa vraie appellation est le port de l’Andelle. Si le flottage du bois sur l’Andelle remonte au Moyen Âge, la navigation sur cette rivière est bien connue au XIXe siècle :
En 1822 « les toues* et bateaux chargés de charbon de terre pour les fonderies de Romilly-sur-Andelle passent à Poses sans descendre à Pont de l’Arche ; les bateaux qui descendent les bois chargés à l’embouchure de l’Andelle ne passent pas à Poses mais passent à Pont-de-l’Arche ». Ce qui semble signifier que le charbon vient des houillères du Nord par les canaux, l’Oise et de la Seine-amont et les bois venant probablement de la forêt de Lyons par flottage sont plutôt débarqués dans un port sommaire avant d’être transportés vers Rouen.
* toue, du verbe touer : tirer avec une chaîne, un câble ou une corde. Et celui qui tire est un toueur ….

Le port de Poses à Pîtres.
L’arrêté suivant de 1833 prouve l’existence d’un port à l’embouchure de la rivière.

Le port de Poses à Pîtres. Extraits des arrêtés du Préfet de l'Eure
Extraits des arrêtés du Préfet de l'Eure

Dans un rapport de 1894, il est fait allusion à un port construit sur la rive droite de la Seine
Le port de Poses à Pîtres. Extrait du  rapport de l’ingénieur  en chef pour la tournée d'inspection de 1894
Extrait du rapport de l’ingénieur en chef pour la tournée d'inspection de 1894

En 1905, l’Andelle n’est considérée comme rivière navigable et flottable que dans sa partie comprise entre le barrage de Sainte-Hélène (ancienne porte marinière) et son embouchure dans la Seine.
Le port de Poses à Pîtres. Vue de l’embouchure de l’Andelle en 1919
Vue de l’embouchure de l’Andelle en 1919

Le port de Poses à Pîtres. Extrait  du  cadastre  de Pitres de 1825 et cours navigable de l'Andelle
Extrait du cadastre de Pitres de 1825 et cours navigable de l'Andelle

En 1905, est reconstitué le port à l’embouchure de l’Andelle avec palées d’évitage et estacade sur la rive gauche. (voir ci-dessous)
Le port de Poses à Pîtres. Vue de l'estacade sur l’Andelle
Vue de l'estacade sur l’Andelle

Le port de Poses à Pîtres. Plan de détail du port de Poses en 1905
Plan de détail du port de Poses en 1905

Un pont sur l'Andelle, construit en 1850 était appelé « Pont de halage ».
Le port de Poses à Pîtres. Vue du débouché  historique de l'Andelle
Vue du débouché historique de l'Andelle

Lorsqu’en 1926, on fut amené à fermer la première écluse, celle de 1850, aux bateaux de commerce, on la transforma en port ouvert de l’amont ; on construisit même une voie de chemin de fer de l’ancien port et de l’usine Fréret jusqu’à l’écluse.
La figure ci-dessous, une publicité des établissements Fréret spécialisés dans les clôtures en béton armé (voir notre bulletin n° 2), montre une vue du port de Poses sur le cours aval de l’Andelle avec son estacade, le pont, et des infrastructures également côté Seine.
Le port de Poses à Pîtres. Etablissements Fréret

Le port de Poses à Pîtres. L'Andelle près de son  embouchure en 1919 . On voit le remous que créait  l'Andelle à la sortie des écluses. Source : IGN
L'Andelle près de son embouchure en 1919. On voit le remous que créait l'Andelle à la sortie des écluses. Source : IGN

Le port de l’Andelle cessa son activité avant 1940. Dans les années 30, on creusa un canal ramenant l’embouchure de l’Andelle à 500 m en aval ; on combla l’ancien lit de la rivière ce qui supprima le port de l’Andelle. Par ailleurs, dans les mêmes années 30, fut construite la nouvelle grande écluse, ce qui entraîna la disparition du dernier port dans l’ancienne écluse.
Le port de Poses à Pîtres. Vue du port de Poses d'Amfreville-sous-les-monts, établi  dans l'ancienne écluse de 1850
Vue du port de Poses d'Amfreville-sous-les-monts, établi dans l'ancienne écluse de 1850



Hubert Labrouche



1 octobre 2017

Crues de la Seine et de l’Andelle

Inondations Seine Andelle Côte des deux-Amants

Crues et inondations de la Seine et de l'Andelle

 

Distinguons d'abord crue et inondation : on parle de crue lorsque le débit d'un fleuve ou d'une rivière dépasse une certaine valeur (pour la Seine à Poses 1500 m³ par seconde, alors que son débit moyen est de 420 m³ et le débit minimal de 65). On voit alors l'eau monter dans le lit, et on parle d'inondation quand l'eau sort de ce lit. L'inondation est bien sûr ce qui marque le plus les hommes, redoutable par ses effets. On ne peut en mesurer l'importance que par la hauteur atteinte par l'eau en un point donné. 
Zouave du Pont de l'Alma
Zouave du Pont de l'Alma
C'est ainsi que tout le monde connaît le célèbre zouave du pont de l'Alma qui sert de repère de crue à Paris.
On distingue, en fonction de leur fréquence et de leur gravité quatre types de crues : décennale, vingtennale, cinquantennale et centennale.

CRUES ET INONDATIONS DE LA SEINE ET DE L'ANDELLE

Les premières crues de la Seine connues sont mentionnées en 358-59 et 582, puis elles ont été répertoriées presque en continu depuis le 12ème siècle. On trouve trace de 4 ou 5 par siècle jusqu'au 17ème, qui en compte onze, puis les chiffres s'emballent : huit au 18ème, 10 au 19ème et 18 au 20ème. 
Crues de 2016 Seine
crue de 2016 : échelle d'alerte, du vert au rouge, déclenchée par le Préfet de l'Eure

Pour le 21ème siècle, 2001, et bien sûr 2016, forte à Paris, mais restée modeste et brève sur notre territoire car il n'y a pas eu de crue de l'Oise, qui rencontre la Seine 70 km en aval de la capitale.

Origine des inondations

Ce sont d'abord, bien sûr, les précipitations. Prenons deux exemples :
la crue de 1910
fortes pluies en septembre et octobre 1909, novembre relativement sec, mais décembre copieusement arrosé, soit 450 mm de pluie au dernier trimestre 1909 : le double de la normale !
en janvier 1910, des pluies fortes (le double de la normale) tombent sur des sols saturés
la crue de 1955
novembre et décembre 1954 pluvieux
début janvier 1955, sol gelé et forts passages pluvieux, puis très fortes précipitations.

Pour nos communes, situées en aval du barrage de Poses, et ceci est valable pour toute la basse vallée de l'Andelle (on peut sentir l'effet de la marée jusqu'à la porte marinière, le vannage qui se trouve à la limite de Pîtres et de Romilly), l'effet des marées est déterminant : l’onde de marée montante freine l’écoulement des eaux de la Seine (marnage* à Poses : 1 à 2m voire 2,50m).

* marnage : différence de hauteur de l'eau entre deux marées.

La pression atmosphérique joue aussi son rôle : une baisse de pression entraîne une augmentation du niveau de la mer, et en plus, le vent d'ouest repousse les eaux dans la Seine.
L'élévation du niveau des mers dûe au réchauffement climatique joue aussi un rôle, qui ne pourra qu'augmenter.
A cela s'ajoutent les effets négatifs de l'action humaine : l'imperméabilisation des sols, la disparition des zones humides, les constructions, les remblaiements, les carrières. Les moyens de lutte contre les inondations existent mais se révèlent souvent insuffisants : barrages réservoirs, digues de protection …

Les débits de la Seine de 1987 à 2006, en m3/s
Les débits de la Seine de 1987 à 2006, en m3/s. A partir de 2000 m3/s commence généralement l'inondation. Le graphique permet donc d'en repérer cinq en 20 ans.

Vitesse d'écoulement et vitesse de propagation de la crue.

La pente moyenne de la Seine est de 9 cm par km de Paris à Poses (c'est très peu), 20 cm d'Andé à Pont de l’Arche et 30cm à Poses. La vitesse d’écoulement maximale à l’approche du barrage de Poses peut atteindre 3,50 m par seconde, soit près de 13 km/heure. Mais la vitesse de propagation de la crue étant de 3 km/h au maximum, soit 70 km par jour, deux à trois jours pour atteindre Poses après Paris.
Inondations Seine Andelle Côte des deux-Amants
Inondations de la Seine vues de la Côte des deux-Amants

Vitesse de la montée des eaux

En 1876, il a fallu 27 jours pour que la montée des eaux atteigne deux mètres, soit une montée moyenne de 7 cm par jour.
En 1910 la montée des eaux à Paris au pont de la Tournelle sera de 3,81 m du 20 au 28 janvier, soit 47 cm par jour.
La Seine a des crues lentes, mais il semblerait que les très récentes soient plus rapides.

Seine crue de 1994 barrage de Poses
1994. Le barrage "au clair" (complètement ouvert)


Volume d'eau écoulé

En 1876, 4 230 millions de m3 en 45 jours à Paris
En 1910, 260 millions de m3 par jour à Poses, soit plus de 5 milliards de m3 durant la crue, et en 1970, 4 500 millions de m3 en 28 jours

Durée des crues

Elle dépend essentiellement de la vitesse à laquelle l'eau va pouvoir s'évacuer dans la mer. La faible pente de la Seine rend cette durée assez longue.
En 1910, par exemple la crue dure deux mois à Paris avec 8 jours de débordement maximal, 20 jours à Poses dont 5 jours de débordement majeur.

On a connu ensuite à Poses :
- 1955 : 18 jours
- 1970 : 28 jours
- 1982 : 22 jours
Soit une moyenne de 15 à 20 jours de crue.
Crue de la Seine de 1910
L'inondation de 1910 (photo panoramique originale, archives Françoise Cantrelle)
L'inondation en 1910, Seine et Andelle
L'inondation en 1910, Seine et Andelle

Les inondations sur la basse Andelle - Crues historiques de 1910, 1995, 1999 et 2001

Elles sont entièrement dépendantes des crues de la Seine, mais peuvent être évidemment renforcées par les eaux venant de l'amont en cas de fortes pluies sur le haut de la vallée.
De Pîtres à Romilly, on a donc connu régulièrement les mêmes inondations que la vallée de Seine, touchant les parties basses de ces communes.
Pîtres L'île Sainte-Hélène crue Seine 1910
L'île Sainte-Hélène 

Pîtres La route d'Amfreville crue Seine 1910
La route d'Amfreville

Pîtres La guinguette crue Seine 1910
La guinguette

Pîtres La rue des moulins crue Seine 1910
La rue des moulins


Sources :
Archives de l'Association des amis de la batellerie.
Archives personnelles.


Hubert Labrouche